A l’attention du lecteur.
Le plus petit livre d’histoire de la CORSE mentionne toujours au moins une fois le nom de notre village.
Alors que les archives relatives à la CORSE n’ont pas encore été explorées dans leur intégralité, ce recueil ne prétend donc pas relater la totalité de l’histoire de notre village.
De la bataille de Ponte Novu il a été particulièrement retenu ce proverbe, encore très présent dans la mémoire des ressortissants de la Castagniccia, » Traditore cumu un lenticu « . Certains, se réclamant du statut d’historien, ont écrit que ce combat avait été perdu par les corses du fait de la trahison des habitants de Lentu.
Pour éradiquer cette réputation profondément injuste il reste à énumérer dans un élargissement de ce même recueil la liste des familles corses qui avaient opté pour le parti de la France bien avant que le corps expéditionnaire français du Comte de VAUX ne débarque à Saint Florent début mai 1769.
Après que le NEBBIO se soit rapidement rallié aux troupes du roi de France que pouvait opposer comme résistance déterminante un village de 500 habitants face à une armée de 25000 hommes de guerre, dotée d’artillerie et augmentée en nombre par des volontaires corses ?
Il fallait à tout prix préserver l’influence de certaines familles en désignant de façon inique un village et ses habitants à la vindicte de l’opinion. Les historiens qui se respectent savent fort bien identifier les tenants et les aboutissants de cette méthode…
SITUATION GEOGRAPHIQUE
En position dominante sur la rive gauche du fleuve GOLO, bâti en corniche à 600 m d’altitude sur un éperon, orienté Est /nord-est, compris entre les ruisseaux » di lucciu » et » de pidocchiosa « , le village de LENTO attire incontestablement le regard de celui qui circule sur la nationale 193 entre BASTIA ET CORTE.
La surface du territoire communal est de 2372 ha et s’étend depuis la rive gauche du GOLO jusqu’au Monte Reghja di Pozzo (1 469m) et au Monte Sant’Anghjulu di Tenda (1 389 m) d’où l’on peut observer la baie de Saint Florent et la chaîne centrale des points culminants de la CORSE avec au premier plan les aiguilles de Popolasca.
Des recherches en cartographie conduites par Mme MORACCHINI-MAZEL ont démontré que le Monte Sant’Anghjulu di Tenda avait fort bien pu servir dans l’antiquité de point de repère pour la navigation maritime, des moines entretenant en permanence un feu durant la nuit.
Lento appartenait à l’une des 66 » pieve » constituant la CORSE, la pieve de BIGORNO. Le terme de » pieve » venant du latin » plebs » indiquait l’ensemble des familles rassemblées en une même collectivité – au XVIII ème siècle, la pieve désignait un territoire, une circonscription religieuse et une communauté morale.
La pieve de BIGORNO se composait des villages de BIGORNO, CAMPITELLO, LENTO, SCOLCA et VOLPAJOLA. Le village de CANAVAGGIA a tantôt été rattaché à la pieve de BIGORNO, tantôt à la pieve de CACCIA.
LENTO appartient depuis 1976 au canton de l’Alto di Casacconi, réunion des anciens cantons de CAMPITELLO (CUSTERA) et de CAMPILE (CASACCONI).
QUELQUES DATES
Très longtemps point de passage obligé pour la conquête ou la maîtrise de la CORSE en même temps que lieu d’affrontement choisi par les communautés de la CASTAGNICCIA pour éviter que la guerre ne se déroule chez elles et ne desserve la prospérité de leurs villages, la communauté de LENTO a subi les méfaits de nombreux conflits et sa population s’en est toujours ressentie.
1553 – Henri II, roi de France, décide d’occuper la CORSE pour contrecarrer les visées de l’empereur Charles-Quint. Le général De Thermes ayant sous ses ordres SAMPIERO, colonel général du régiment royal corse, débarque en CORSE le 22 août avec 19 légions dont 12 italiennes, 6 françaises et 1 de volontaires corses obéissant à SAMPIERO. Les génois se replient – Alessandro de LENTO, lieutenant des compagnies de SAMPIERO, se voit confier la garde du château de CORTE.
1554 – Andréa DORIA dirige la réaction génoise et avec un renfort de 4000 espagnols, sous les ordres de Don Louis de Lugo Adolentado, et de 1 000 allemands, commandés par le comte Albéric de Lodron, oblige De Thermes à se replier de MURATO sur LENTO. Le général français fait construire dans ce village un fort qu’il dote d’une bonne garnison. Augustin SPINOLA, lieutenant de DORIA, attaque sans succès ce fort.
1557 – Le 7 avril, le roi de France, Henri II, et le roi d’Espagne, Philippe II, fils de CharlesQuint concluent une trêve de cinq ans, les conditions de celle-ci stipulent que chacun restera en possession des places qu’il occupe, ces conditions ne furent pas respectées en CORSE.
Alessandro de LENTO fut blessé à mort près de BASTIA. » Comme il s’était toujours conduit avec humanité pendant la guerre, les génois envoyèrent son corps avec honneur à sa compagnie » (F. Girolami-Cortona, Histoire de la CORSE).
1559 – Le 3 mai, signature du traité du CATEAU-CAMBRESIS exigeant des français la restitution de la CORSE aux génois.
1564 – Sampiero, avec des volontaires corses et français, reprend la lutte contre la république de Gênes. Lors du combat de la Pietrera de Caccia, il poursuit et défait les génois depuis Ponte-Leccia jusqu’à Volpajola.
1565 – Etienne DORIA fait incendier LENTO et une partie de la pieve de BIGORNO.
1732 – Grande révolution des Corses contre Gênes (1729 – 1755) – Celle-ci fait appel à l’empereur Charles VI d’Allemagne, roi de Hongrie et de Sicile – à la mi-avril le général De Schmettau débarque à Bastia et prend ses dispositions pour camper près des gorges de Lento et de Tenda. De Schmettau attaque Lento, il est contraint de battre en retraite après un combat sanglant. Il attaque à nouveau ce village, s’en empare, l’incendie et n’épargne que la maison du vieux Pietro à qui il accorde, ainsi qu’à sa fille, la liberté en reconnaissance de leur bravoure.
Le corps expéditionnaire allemand coûtait aux génois 30 000 florins par mois et pour chaque homme tué ou disparu une indemnité de 100 florins.
1739 – Cette année là, c’est Louis XV, le roi de France, qui vient au secours de Gênes (du 6/02/1738 au 7/09/1741) – Début juin le marquis De Maillebois et le colonel D’Auray défont les patriotes corses à Bigorno, Tenda et Lento où Giacinto PAOLI est battu et s’engage à faire rendre les armes à la piève du Rostino.
1740 – Les français occupent la moitié de l’église de Lento pour le logement des troupes; des dégradations sont commises.
1741 – Les français quittent la Corse le 7 septembre 1768 – Le 15 mai, Gênes vend » a réméré » la CORSE à la France par le traité de Versailles ; une partie de ce traité restera secrète un temps pour masquer le fait que la république de Gênes renonçait définitivement à la possession de la Corse. Les français reviennent pour soumettre la Corse à la couronne de France mais le 10 octobre ils sont sévèrement battus à Borgo et l’influence de cette défaite sur la cour de VERSAILLES laissa un moment à penser que la conquête de la CORSE serait abandonnée.
1769 – Le général comte De Chauvelin est remplacé à la tête des troupes françaises par le général comte De Vaux, militaire expérimenté, qui débarque à Saint Florent avec un important corps expéditionnaire résultant de l’attention particulière de la part de Choiseul, ministre de Louis XV.
Le 1er mai au matin, il disposa vingt bataillons à OLETTA, seul village qu’occupaient les français ; le 2 et le 3 il assura les arrières de son armée, le 4 il fit faire des mouvements de diversion et le 5 au petit matin engagea les hostilités.
Le Nebbio, très influencé par M. de PETRICONI, ne livre qu’une faible résistance à l’avance des français et malgré l’opiniâtreté avec laquelle Clément PAOLI, frère de Pascal, défend la Bocca di Lento (bocca a croce), le comte De Vaux s’installe dans Lento et en fait son quartier général le 7 mai. Les troupes paolines engagées sur les contreforts de Lento battent en retraite et sont défaites à Ponte Novo le 8 mai 1769. Les troupes françaises quittent LENTO le 16 au matin et passent sur la rive droite du Golo.
Comme l’a dit l’abbé De Germanes : « ….. dans toutes les invasions étrangères, depuis les Romains jusqu’aux génois et à l’expédition de De Thermes en 1553, toute la force défensive de l’île réside sur les hauteurs de Lento et le col de Tenda « . » Qui est maître de ce poste peut prendre l’île en deux heures « , a dit aussi le général Dumouriez.
1775 – Début des relevés par les géomètres de Louis XV concernant le Plan Terrier, inventaires et plans concernant Lento sont approuvés en 1777.
1831 – Naissance à Lento de Paul, Mathieu, NOVELLINI (1831- 1920), artiste peintre, membre de la Société des Artistes Français, électeur au Jury International des Beaux Arts, Officier d’Académie, auteur d’allégories sur la Corse au XVIIIème siècle.
Vers 1910 – Apparition des première automobiles en Corse.
1911 – Lento, 530 habitants, est l’une des 7 communes de plus de 501 habitants à ne pas être pourvues de débouchés carrossables.
1997 – Inauguration de la piscine municipale de Lento ; la décision de la construire avait été prise en septembre 1989.